Une étude dévoile la façon dont les chevaux attribuent une réputation aux humains

Les animaux, et notamment les chevaux, se comportent parfois différemment en fonction de l’humain qu’ils ont face à eux. Cela s’explique par plusieurs facteurs, y compris la réputation de la personne auprès de l’équidé ! Les chevaux sont en effet capables de considérer différemment chaque humain, et une étude française a révélé comment ce processus fonctionne. Il en découle des observations et précautions intéressantes pour favoriser de bonnes relations homme-cheval :

chevaux
Les chevaux sont capables d’attribuer une réputation différente à chaque humain. (© Pixabay)

Les chevaux sont réputés pour être particulièrement fins et sensibles, ce qui se ressent dans leurs relations avec l’homme. Comme d’autres animaux, ils sont même capables d’attribuer une réputation spécifique à chaque humain. Les chercheuses françaises Plotine Jardat, Léa Lansade et Marianne Vidament se sont intéressées à ce sujet dans le cadre d’une thèse et ont mené une étude pour comprendre comment cette réputation peut se construire. Pour cela, elles ont exposé 23 chevaux à la même expérience qui s’est déroulée en plusieurs étapes :

  • La projection d’une vidéo où l’on voit une interaction positive entre un cheval et un humain A. «  Un expérimentateur le grattait au niveau de l’encolure. Le cheval faisait une mimique typique montrant qu’il appréciait ce geste : encolure abaissée, oreilles dirigées vers l’arrière, lèvre supérieure étendue en geste de grooming (ndlr : toilettage mutuel) vers l’humain », précisent les chercheuses. Cette vidéo comme la suivante a été présentée sur un écran en taille réelle et sans son.
  • La projection d’une autre vidéo où l’on aperçoit une interaction négative avec une autre personne (humain B). « Il lui touchait les oreilles et dirigeait vers lui un spray d’air. Le cheval réagissait en se secouant et en s’écartant, montrant qu’il n’appréciait pas ce geste. »
  • Après le visionnage des deux vidéos, les humains A et B vus dans les vidéos se présentaient dans le boxe en même temps et se positionnaient de part et d’autre du cheval en le laissant interagir librement avec eux.

Des émotions contagieuses entre chevaux

Les scientifiques ont analysé à la fois les réactions des chevaux face aux vidéos et face à la présence des humains A et B dans le boxe. Sans surprise, la vidéo d’interaction positive a suscité une réaction positive : la fréquence cardiaque a diminué et les chevaux avaient des expressions faciales et des postures que l’on observe habituellement dans des situations positives. Certains ont même exprimé des comportements de grooming similaires à ceux des chevaux dans la vidéo. A l’inverse, la vidéo montrant une interaction négative a produit une augmentation de la fréquence cardiaque chez les chevaux et ceux-ci n’ont pas ou très peu exprimé de comportements de grooming « Leurs expressions faciales et leurs postures ressemblaient à celles observées dans des situations négatives : une encolure haute, avec les oreilles en avant et les yeux grands ouverts », détaillent les chercheuses françaises.

chevaux
Les chevaux peuvent ressentir des émotions rien qu’en étant témoins d’une scène. (© Pixabay)

Ces premières observations par rapport aux vidéos montrent que non seulement les chevaux ont compris ce qu’il se passait dans les images projetées, mais aussi qu’ils peuvent ressentir des émotions simplement en étant témoins d’une scène qu’ils n’ont pas vécue directement. Ce phénomène de transmission du ressenti d’un animal à l’autre est appelé « contagion émotionnelle » par les scientifiques.

Un comportement différent face à chaque humain

Outre la réaction des chevaux aux vidéos, les chercheuses ont aussi analysé leur comportement face à la présence directe des humains vus sur les images. Contrairement à ce qu’on pouvait imaginer, les chevaux ont davantage touché l’humain ayant eu une interaction négative avec leurs congénères dans la vidéo. Selon les scientifiques, ce comportement pourrait être interprété par « une tentative d’apaisement suite au conflit qu’ils ont observé ». Ce genre de contact amical a déjà été observé lors de conflits au sein de groupes de chevaux.

chevaux
Les chevaux différencient les humains et en tiennent compte pour adapter leur comportement. (© Pixabay)

Les chercheuses retiennent aussi et surtout de ces observations que les chevaux ont réussi à distinguer les deux humains et à adapter leur comportement face à eux simplement en ayant été témoins d’une interaction avec un autre équidé. Cette capacité se nomme « indiscrétion sociale ». « On dit aussi que les chevaux attribuent une réputation aux humains car, suite à ce qu’ils ont observé d’un humain interagissant avec un congénère, ils « classifient » mentalement cet humain (ici, comme une personne qui interagit positivement ou négativement avec les chevaux) et utilisent ensuite cette information pour décider comment interagir avec lui », soulignent aussi les scientifiques.

Les leçons à en tirer

Cette expérience a priori simple est riche en enseignements sur la relation homme/cheval. S’il était évident que les interactions directes pouvaient impacter le comportement de l’équidé vis-à-vis de l’humain, on sait désormais que c’est aussi le cas des contacts indirects. Les auteures de cette étude recommandent donc de limiter au maximum les échanges négatifs avec le cheval, mais aussi avec ses voisins.

Le fait que le cheval puisse ressentir des émotions en étant témoin d’une scène (contagion émotionnelle) incite aussi à prendre certaines précautions. « Si on sait qu’un cheval réagit fortement à certaines manipulations, comme des soins vétérinaires, il vaut mieux ne pas le faire devant des congénères déjà émotifs ou sensibles, comme les plus jeunes, qui pourraient à leur tour prendre peur », illustrent les scientifiques.

Retrouvez ici toutes les informations concernant l’étude réalisée par Plotine Jardat, Léa Lansade et Marianne Vidament.

Marie-Eve Rebts

Co-fondatrice de Cheval-in, Marie-Eve est cavalière depuis plus de vingt ans, et journaliste équestre depuis une dizaine d'années. Elle pratique le dressage mais adore le monde équestre dans sa globalité, et s'est même essayée avec joie à de nombreuses disciplines comme l'équitation américaine, le TREC ou le horse-ball !