Quel poids un cheval peut-il supporter ?

Le poids du cavalier est parfois un sujet tabou, mais essentiel à prendre en compte pour le bien-être du cheval. Toutefois, il n’est pas évident de déterminer à quel moment un cavalier devient trop lourd pour sa monture… La Fédération nationale suisse des sports équestres s’est penchée sur la question au travers d’une brochure qui explore différents aspects intéressants comme le niveau de formation du cheval et du cavalier, l’utilisation, la race de l’équidé, etc. Explications :

© Christophe Bortels

On entend souvent qu’un cheval peut porter l’équivalent de 15 à 20% son poids, et cela a été confirmé par plusieurs études. Au-delà de ce ratio, la plupart des équidés montreraient des signes de mal-être ou de douleur, et parfois même des boiteries. Mais faut-il pour autant interdire l’équitation aux personnes qui dépassent ce pourcentage, que ce soit à cause d’un surpoids ou simplement d’une stature plus importante ? La réponse est évidemment non, mais chaque cavalier se doit de veiller au bien-être des chevaux en choisissant une monture adaptée à son gabarit. Cela vaut entre autres pour les personnes plutôt lourdes, mais aussi pour les enfants ou adolescents qui montent à poney par exemple.

La question de la charge qu’un équidé peut porter n’est par ailleurs pas qu’une question de poids, mais elle implique bien d’autres critères. Pour sensibiliser à cette problématique, la Fédération nationale suisse des sports équestres (FNCH) a récemment édité une brochure qui rassemble différentes informations et pistes de réflexion sur le sujet du poids. On peut y lire que « les chevaux et les poneys ne sont pas nés pour porter des charges, mais l’entraînement et la formation les en rendent capables jusqu’à un certain point. Dans les sports équestres, le poids du corps d’un cavalier joue un rôle important et il présente de nombreuses facettes. Il est impossible de le fixer de façon réglementaire avec une valeur universelle. »

Un poids, plusieurs facettes

Comme le précise le document de la FNCH, de nombreux facteurs sont en effet à prendre en compte pour estimer si un cavalier représente une charge trop importante pour son cheval :

  • la forme du cavalier : peu importe le poids, une personne en bonne condition physique dérange moins son cheval qu’un cavalier en mauvaise forme. L’équitation est certes un sport mais elle ne permet pas de brûler autant de calories que certaines activités plus intenses, donc il peut être utile de pratiquer des sports complémentaires pour perdre du poids ou simplement pour développer sa condition et sa musculature, ou encore pour éviter les blessures. La FNCH a justement développé spécifiquement un programme de fitness à destination des cavaliers qui souhaitent être en meilleure forme, à pied comme en selle. L’équilibre est aussi un élément important en équitation, et s’il fait défaut au cavalier on peut l’améliorer avec du yoga, des séances sur simulateur équin, du pilates, etc. De manière générale, plus le cavalier sera en forme physique, mieux il sera armé pour ne pas gêner son cheval. A côté de sa condition, le cavalier doit bien sûr aussi travailler sur sa technique équestre car c’est un autre ingrédient crucial pour être bien en selle par rapport à son cheval.
La question du poids se pose aussi pour les adolescents et adultes qui montent à poney ou sur des petits chevaux légers. (© Christophe Bortels)
  • l’entraînement du cheval : dans sa brochure, la FNCH rappelle qu’un cheval ne nait pas porteur de poids mais le devient avec l’entraînement. Il est donc important de ménager les jeunes chevaux et d’éviter les charges lourdes sur des équidés qui ne sont pas suffisamment musclés. En parallèle de la musculature, il ne faut par ailleurs pas négliger l’importance de l’endurance du cheval, sa stabilité et sa souplesse. Par ailleurs, la FNCH rappelle qu’il est important d’intégrer dans l’entraînement des équidés des séances avec des mouvements libres, sans le poids du cavalier.
  • l’équipement : le poids du matériel équestre est rarement un problème, car aujourd’hui il est plutôt léger. L’ergonomie et l’adaptation sont par contre des points à surveiller car une selle qui ne correspond pas au cheval peut créer des points de pression et surtout mal répartir le poids du cavalier sur le dos.
  • la santé du cheval : un cheval fragile et qui souffre par exemple de maux de dos sera moins enclin à porter des charges élevées. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, un équidé en surpoids est aussi inadapté pour des cavaliers plus lourds car son appareil locomoteur est déjà sollicité par son propre excédent de poids. Avec ces chevaux, mieux vaut donc privilégier des cavaliers plus légers.
  • la race et la stature du cheval : de par leur corpulence et/ou leur race, certains chevaux sont qualifiés de « porteurs », c’est-à-dire qu’ils sont capables de supporter des charges plus lourdes. C’est généralement le cas des chevaux islandais, de Camargue, des Quarter Horses, Frisons ou encore Franches-montagnes. Il faut toutefois garder à l’esprit que tous les chevaux ne sont pas semblables au sein d’une même race, et qu’il est donc préférable d’évaluer les équidés au cas par cas.
  • l’intensité du travail : la sollicitation du cheval n’est évidemment pas identique lors d’une promenade au pas ou d’un parcours d’obstacle. L’intensité du travail est donc un élément à prendre en compte en parallèle de l’entrainement du cheval, tout comme la fréquence. Un cheval pourra en effet sans doute supporter un cavalier lourd occasionnellement et lors de faibles efforts, mais il aura plus de difficultés à effectuer des séances intenses et régulières avec une charge importante sur le dos.

Des outils d’évaluation

Pour évaluer à quel point un cheval est porteur, on peut se référer à l’indice de charge du canon. C’est un calcul dans lequel on multiplie la circonférence du canon du cheval par 100 et l’on divise ensuite ce nombre par le poids de l’équidé pour obtenir l’indice. Plus celui-ci est élevé, plus le cheval est robuste et peut a priori porter des charges, à condition bien sûr de remplir d’autres critères comme une bonne santé et un bon entrainement. Comme on peut le voir ci-dessous dans l’extrait de la brochure de la FNCH, un shetland est beaucoup plus porteur à la base qu’un demi-sang ou un pur-sang arabe.

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Pour calculer l’indice de charge du canon, la circonférence du canon est multipliée par 100 et divisée par le poids du cheval. (Extrait de la brochure FNCH)

Comme la robustesse du cheval est loin d’être l’unique critère à prendre en compte, la Fédération Suisse propose aussi un diagramme d’évaluation plus global que chaque cavalier peut télécharger sur son site. Il consiste à évaluer différents critères humains et équins de 1 à 10 et de les représenter dans un graphique. Plus l’étendue de celui-ci est large, plus le couple cavalier/cheval se trouve dans une situation idéale. A l’inverse, un graphique restreint indique un cas critique. L’outil est bien évidemment utile pour les cavaliers grands et/ou costauds qui ont des doutes par rapport à l’impact de leur poids mais il peut aussi être utilisé par toute personne qui s’intéresse au bien-être équin.

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Le diagramme permet d’évaluer différents critères et d’avoir une vue d’ensemble de l’adéquation cavalier/cheval au niveau du poids.

Au regard des différents éléments exploités dans cette brochure, on s’aperçoit que la question du poids est vraiment personnelle à chaque couple cavalier/cheval. Au lieu de s’arrêter aux chiffres affichés sur une balance, il est intéressant d’aller plus loin dans le questionnement. Il en va du bien-être du cheval mais aussi de son cavalier !

Marie-Eve Rebts

Co-fondatrice de Cheval-in, Marie-Eve est cavalière depuis plus de vingt ans, et journaliste équestre depuis une dizaine d'années. Elle pratique le dressage mais adore le monde équestre dans sa globalité, et s'est même essayée avec joie à de nombreuses disciplines comme l'équitation américaine, le TREC ou le horse-ball !