Muserolle : pourquoi est-ce nécessaire de la desserrer ?

Depuis quelques années, des voix s’élèvent et des règlements de compétition se mettent en place pour limiter le serrage de la muserolle. Plusieurs études ont en effet révélé qu’un mauvais réglage peut avoir des conséquences néfastes et parfois irréversibles sur les chevaux. Mais de quels dangers parle-t-on au juste ? Et comment bien régler sa muserolle pour qu’elle soit efficace mais pas nocive ? Réponses avec Géraldine Vandevenne, spécialiste en adaptation de l’harnachement.

Avez-vous déjà hésité au moment de boucler la muserolle de votre cheval ? C’est un petit geste que les cavaliers effectuent au quotidien et pourtant, il n’est pas si anodin… Une muserolle trop serrée peut en effet avoir des effets particulièrement désagréables pour le cheval. Une étude australienne a par exemple analysé les réactions de 12 chevaux face à des serrages plus ou moins importants. Les chercheurs ont observé que durant leurs essais statiques avec les muserolles les plus serrées, les chevaux mâchaient significativement moins, or ce comportement est associé à la relaxation. Le stress des chevaux équipés d’une muserolle serrée se manifestait aussi par une augmentation de la fréquence cardiaque et de la température de l’œil – lequel dégage de la chaleur lorsque le système nerveux est mis à l’épreuve. Les chercheurs ont par ailleurs souligné que l’ajout d’un cavalier et d’actions sur les rênes risquaient de le stress encore plus élevé que lors de ces tests statiques.

Géraldine Vandevenne, spécialiste en bit fitting, explique qu’une muserolle trop serrée risque aussi de nuire au bien-être du cheval de plusieurs autres façons : « Cela comprime les voies respiratoires et limite donc les capacités du cheval, qui se fatigue plus vite », précise-t-elle. « Une muserolle mal adaptée peut aussi compresser certaines terminaisons nerveuses et créer des irritations prolongées qui poussent les chevaux à retrousser ou battre les lèvres. Et puis surtout, un serrage trop fort empêche le cheval de bouger la mandibule (ndlr : os de la mâchoire inférieure), ce qui peut altérer plus largement ses mouvements et créer des phénomènes de compensation comme par exemple des chevaux qui se figent dans le haut de la nuque. »

Malheureusement, ces conséquences ne sont pas toujours visibles et, à l’inverse, certains cavaliers pensent qu’il est nécessaire de resserrer leur muserolle pour empêcher des comportements désagréables. « Si le cheval sort la langue ou ouvre la bouche par exemple, serrer la muserolle va peut-être masquer le problème mais certainement pas le régler », souligne Géraldine Vandevenne. « Pire, cela peut aussi engendrer d’autres soucis car le cheval risque d’adopter des comportements de compensation. »

Abandonner la muserolle ?

Bref, il ne fait aucun doute qu’une muserolle trop serrée nuit au bien-être du cheval et risque de générer davantage de problèmes à long terme. Est-il pour autant préférable d’abandonner totalement cette partie du bridon ? Pas forcément… « Il est vrai qu’avec un cheval bien éduqué, et pour des activités comme du dressage ou de la promenade, la muserolle est dispensable », explique Géraldine Vandevenne. « Toutefois, on pourra plus difficilement s’en passer dans des disciplines comme le cross ou le jumping car la muserolle est utile pour stabiliser le bridon et le mors, notamment lors de certaines actions de main plus fortes. »

La muserolle a donc une véritable fonction et, comme la plupart des outils, elle n’est pas néfaste si elle est bien utilisée et bien ajustée. Pour éviter un serrage trop important, on recommande généralement de pouvoir passer un doigt entre celle-ci et l’os nasal du cheval, de sorte à ne pas entraver la respiration et les mouvements de la mandibule. Il faut aussi être attentif à la hauteur de la muserolle, qui doit être placée au moins un doigt en dessous de l’apophyse du cheval. De manière générale, Géraldine Vandevenne conseille aussi « d’éviter une muserolle trop petite, qui risque d’être trop serrée même en la fermant au dernier trou ».

Il faut aussi savoir que certains modèles sont plus sévères que d’autres, à commencer par ceux avec une partie en corde. Les muserolles avec fermeture « pull back » présentent quant à elles le danger d’être plus faciles à serrer, mais lorsqu’elles sont bien réglées elles s’avèrent généralement confortables grâce à leur largeur et leur rembourrage.

Si votre cheval était habituellement monté avec une muserolle trop serrée, il n’est pas impossible que des problèmes de comportement ou difficultés apparaissent après l’avoir relâchée. Comme l’explique Géraldine Vandevenne, « le cheval va en effet avoir la possibilité de s’exprimer, et l’on se retrouve alors confronté aux soucis qui étaient masquées par la muserolle ». La tentation de resserrer cette muserolle peut alors être grande, mais dans une optique à long terme il est plus judicieux de chercher à trouver les origines des mauvais comportements ou autres : « Il peut s’agir d’un problème d’équitation, d’un matériel mal adapté, de tensions musculaires ou articulaires, de problèmes de dents… » En fonction des causes qui semblent se dégager, l’appel à un professionnel peut alors s’avérer nécessaire et vous permettra de repartir sur de bonnes bases !