Dans les coulisses de la police à cheval
Services d’ordre, patrouilles de surveillance, escorte royale,… En Belgique, les chevaux de police continuent à être privilégiés dans toute une série de missions. Leur nombre a cependant diminué ces dernières années, et plusieurs changements sont en cours au sein de la police à cheval. Ces évolutions sont notamment palpables au sein des écuries fédérales à Bruxelles, où est hébergé l’ensemble de la cavalerie de la police. A travers la visite des lieux, nous vous invitons à découvrir ce qu’est la police à cheval aujourd’hui en Belgique.
Avenue de la cavalerie, Bruxelles. A part le nom de la rue, rien n’indique à première vue la présence d’écuries. Celles-ci sont en effet masquées par les hauts murs qui entourent la caserne dont les origines remontent à la fin du 19e siècle. Une fois dans l’enceinte, on découvre plusieurs bâtiments administratifs, des parkings et six bâtiments d’écuries rassemblés de part et d’autre d’une grande allée qui mène au manège couvert. Ces infrastructures ont été construites juste avant la Première guerre mondiale et ont été étoffées au fil des ans d’un paddock, un rond de longe, un marcheur ou encore une piste extérieure en cours de rénovation. Bref, tous les éléments qu’on retrouve dans une infrastructure équestre classique.
La police à cheval comptait à une époque plusieurs écuries sur le territoire belge, puis ses activités ont été centralisées à Bruxelles dans le courant des années 1980. A cette période, le service rassemblait jusqu’à 300 chevaux mais leur nombre a progressivement diminué au fil des ans, principalement pour des raisons budgétaires. Désormais, les autorités fédérales ont fixé la limite à 120 cavaliers et 110 chevaux, des capacités qui ne sont toutefois pas atteintes en ce moment. Lors de notre visite, une partie des écuries est d’ailleurs vide, mais c’est notamment parce que plusieurs équidés sont partis en opération pour la journée. Pour l’instant, la caserne de Bruxelles héberge une nonantaine d’équidés, mais la police à cheval continue à en recruter et en former.
En ce début d’après-midi, plusieurs jeunes chevaux et leurs cavaliers sont d’ailleurs en train de travailler sur le plat dans le manège couvert. Certains sursautent encore à la vue de notre photographe caché dans un coin ou aux bruits du stand de tir voisin, mais ces réactions diminueront ou disparaîtront au fil de leur apprentissage.
En plus de faire partie de l’escorte royale, les chevaux de police sont principalement utilisés aujourd’hui pour des patrouilles de surveillance et pour le maintien de l’ordre dans des évènements tels que des festivals, matches de foot, sommets européens, etc. Ils sont donc confrontés aux foules, à la circulation routière, au bruit et à de nombreuses situations face auxquelles ils doivent savoir rester calmes. C’est pourquoi avant de partir sur le terrain, les équidés de la police suivent une formation à la fois progressive et complète.
En général, les chevaux arrivent dans les écuries la police entre l’âge de 3 et 6 ans. Ils sont d’abord travaillés au sein de la caserne où ils apprennent les bases du dressage, sautent un peu et sont déjà confrontés à différentes situations. « On met en place dans la piste ce qu’on appelle des « parcours police » avec des drapeaux, de la musique, des bâches ou parfois même du feu à franchir », explique Dirk Roofthooft, Inspecteur et policier à cheval depuis plus de 40 ans. « Au début on peut travailler ces difficultés à pied, puis en selle. »
Les chevaux sont testés après 3, 6 et 9 mois de formation mais chacun évolue à son rythme et les premières sorties en extérieur s’effectuent toujours de manière progressive. « On commence d’abord par de petites promenades en ville avec un autre cheval expérimenté, en alternant les routes et les parcs afin que les chevaux moins habitués puisse profiter de moments plus calmes », poursuit Dirk Roofthooft. « Ensuite, lorsqu’ils sont prêts, les chevaux commencent par des patrouilles courtes et tranquilles, et l’on augmente petit à petit la complexité. »
En se promenant dans la caserne, on remarque aussi une cavalière qui entraîne un jeune cheval à se familiariser au van. Il s’agit d’un apprentissage à part entière lors de la formation des jeunes recrues car si les écuries de la police à cheval sont centralisées à Bruxelles, les missions de celle-ci se déroulent dans toute la Belgique. Le service est équipé de plusieurs camions 4 chevaux ainsi que de camionnettes et vans qui permettent aux patrouilles de se déplacer jusqu’aux lieux où elles opèrent. Entre le transport et la mission, les journées peuvent donc être longues pour les chevaux comme pour les cavaliers.
Recrutements en cours
Les policiers doivent former une véritable équipe avec leurs collègues mais aussi avec leur monture, c’est pourquoi chaque cavalier de police possède un cheval attitré. Leur nom est d’ailleurs associé à celui de leur monture sur chaque plaque de boxe. Anciennement, les policiers à cheval n’étaient pas forcément cavaliers au départ, mais depuis quelques années, le service rassemble majoritairement des passionnés qui ont souhaité combiner leur métier et leur passion. Il ne suffit cependant pas de savoir monter pour entrer dans la police à cheval… Il faut d’abord suivre la formation et les examens pour devenir inspecteur de police, puis rentrer une demande de mobilisation, réussir des tests et enfin suivre une formation spécifique de 16 semaines, notamment pour apprendre les techniques spécifiques d’intervention avec les chevaux.
Actuellement, plusieurs places sont à pourvoir et, comme la police à cheval manque de personnel, elle a fait appel provisoirement à des cavaliers civils indépendants. Ceux-ci ne participent évidemment pas aux missions et opérations, mais ils travaillent les chevaux à la caserne et participent à la formation des jeunes recrues. Certains chevaux de la police prennent en effet de l’âge et Dirk Roofthooft est chargé d’en acheter de nouveaux pour assurer leur relève. « Nous essayons d’acquérir 10 à 15 chevaux par an mais ce n’est pas facile car nous avons des critères précis de taille, de santé, de budget et bien sûr de comportement étant donné les missions auxquelles nos équidés participent », souligne Dirk Roofthooft.
Sur tous les chevaux qu’on lui présente ou qu’il va voir, l’inspecteur en retient généralement un seul sur une dizaine car les critères actuels de l’élevage ne sont pas toujours en phase avec ceux de la police à cheval. Les chevaux de sport belge sont par exemple souvent chers, trop dans le sang et trop légers pour faire carrière dans la police. La police belge cherche donc d’autres solutions, notamment à l’étranger. « Ces dernières années, nous avons acheté une dizaine de chevaux de races nonius et gidran en Hongrie », confie Dirk Roofthooft. « Le Franche-Montagnes est aussi une race intéressante par rapport à nos critères, mais sa taille est souvent trop petite – on cherche des chevaux de minimum 1m64 au garrot. »
On trouve désormais dans les écuries de la police à cheval une certaine variété de races, dont toujours des équidés belges et français, mais aussi une tinker ! Princesse, c’est son nom, porte les tambours de l’escorte royale mais participe aussi aux missions quotidiennes comme les autres chevaux de la cavalerie.
Vers toujours plus de bien-être
Malgré les avancées technologiques, le développement des moyens de transports motorisés et autres, le cheval reste un atout précieux au sein de la police. Comme l’explique Dirk Roofthooft, Inspecteur et policier à cheval, les équidés offrent de nombreux avantages lors des missions de surveillance ou de maintien d’ordre : « En selle, nous voyons plus haut et plus loin, et on nous repère aussi plus facilement. Les chevaux nous permettent également d’être très mobiles et réactifs, et comme ce sont des animaux ils créent de la proximité avec les citoyens. » Les chevaux permettent aussi aux policiers d’accéder à des terrains variés (forêt, plage,…) tout en respectant l’environnement.
La présence de chevaux au sein de la police fait néanmoins parfois débat, surtout au sein de la société. Il y a quelques mois, une pétition avait par exemple été lancée pour supprimer la police à cheval après que deux équidés aient traversé Bruxelles seuls pour rentrer à la caserne car leurs cavaliers étaient tombés lors d’une manifestation au Bois de la Cambre. Les images ont ému certaines personnes, mais en réalité les chevaux sont rentrés sains et saufs. Par ailleurs, comme le précise Dirk Roofthooft, « les accidents en opération sont très rares, notamment parce que les chevaux sont protégés et bien préparés. La plupart des problèmes que nous rencontrons sont plutôt des coliques ou boiteries comme chez les chevaux de sport ou de loisir. »
La police à cheval est par ailleurs toujours plus attentive au bien-être de ses équidés. En général, ceux-ci partent en mission 4 à 5 fois par semaine mais leur programme est adapté en fonction de leur expérience et leur âge. Les chevaux peuvent également profiter de vacances au pré dans une autre infrastructure à Evere. La caserne, quant à elle, comporte sa propre équipe de palefreniers, maréchaux-ferrants et vétérinaires pour assurer les soins aux chevaux aux côtés des policiers. Et puis, les installations sont en cours de rénovation pour apporter encore plus de confort à tout le monde. Une grande salle de pansage et de soins a par exemple été installée dernièrement, tandis que la piste extérieure est en cours de rénovation. La prochaine étape sera la transformation des boxes : ceux-ci sont déjà spacieux et permettent les contacts entre chevaux, mais il est prévu d’y ajouter des paddocks individuels.
Pour l’instant, la police se concentre aussi et surtout sur le recrutement des chevaux. Nous vous en parlerons plus en détails prochainement, dans un article consacré à Ciprus, un charmant jeune cheval qui a récemment rejoint les rangs de la police !