Larissa Pauluis : « Les chevaux, ma thérapie »

Il y a tout juste un an, le 6 mai 2020, Grégoire Naslin nous quittait brutalement, victime d’une crise cardiaque. Il avait 39 ans. Larissa Pauluis perdait un mari, un ami, un repère, le papa de ses deux filles, Capucine et Joséphine. Douze mois plus tard, la douleur reste omniprésente, mais la cavalière de Braine-l’Alleud parvient à l’apprivoiser. Plus motivée que jamais à atteindre le haut niveau du dressage international, elle revient pour Cheval-in sur cette année contrastée.

© Christophe Bortels
Larissa, Grégoire nous a quittés brutalement il y a un an. Il était omniprésent à tes côtés. Comment es-tu parvenue à surmonter cette épreuve ?

J’ai eu la chance d’avoir une famille très présente et des amis et des partenaires (Equifirst, Stablegear – Antarès) qui m’ont bien soutenue. Cette année a été très difficile, avec des up and down et une impression d’avoir une chape de béton au-dessus de la tête. Cette date, c’est très dur. Heureusement j’ai les filles à mes côtés et les chevaux qui sont ma thérapie. La douleur est toujours là. Elle ne partira pas, mais elle s’apprivoise.

Je considère ce 6 mai comme un grand cap. Son anniversaire, le mariage,… toutes les dates sont passées. C’est la dernière. C’est un cap pour me dire que c’est bon, je dois tracer mon chemin. Là j’ai retrouvé un équilibre avec les filles. A nous trois. C’était très important pour nous aider à nous reconstruire.

A côté de cela, je conserve aussi un énorme sentiment d’injustice car c’était le rêve de Greg de voir nos chevaux évoluer au haut niveau. Il est décédé un mois avant le premier Grand Prix de Valentin et j’aurais tellement voulu qu’il soit là à mes côtés pour vivre tous ces instants. Cela me manque de ne plus partager tous ces moments avec lui. Comme cette quarantaine pour les Jeux que nous devrons passer à Aix-la-Chapelle, au milieu des meilleurs cavaliers mondiaux.

La disparition de Grégoire a aussi nécessité une réorganisation du travail aux écuries. Comment cela s’est-il mis en place ?

J’ai appris à gérer la paperasse. C’est lui qui gérait entièrement cet aspect. Aux écuries, j’ai pu compter sur mon équipe qui m’a bien soutenue. Nous arrivons ensemble à maintenir l’endroit aussi joli. Ça continue à tourner. Ce n’est pas toujours facile mais on fait pour le mieux.

Ton encadrement sportif a-t-il également évolué ces douze derniers mois ?

Non. Mais ce qui est compliqué, c’est au niveau logistique. C’est un peu l’explosion du côté des résultats en compétition et j’ai envie d’en profiter. De participer à de beaux concours. Mais pour cela il faut faire entrer de l’argent et donc pouvoir travailler. Ce qui ne serait pas possible si mes parents étaient moins disponibles pour garder les enfants. Je suis toujours encadrée par Mariette Withages et Eddy Swennen, qui m’accompagne toujours en concours et qui est mon oeil à pied.

Larissa Pauluis et Valentin (© Christophe Bortels)
Ton statut a évolué ces derniers mois. D’une cavalière jeunes chevaux, tu es devenue une candidate aux Jeux olympiques…

Oui, cavalière jeunes chevaux c’est en effet l’étiquette qu’on m’a collée durant ma carrière. J’ai formé et vendu des chevaux qui sont destinés à disputer un jour les JO, comme Fame qui se trouve chez Fiona Bigwood. C’est vrai que jusqu’ici, je n’avais pas encore performé en Grand Prix car je n’avais pas eu la possibilité de garder les chevaux. Maintenant c’est différent. J’ai Flambeau (2010, Ampère x Zeoliet) et Valentin (2012, Vitalis x Fidermark), deux vrais bons chevaux pour réaliser de très bonnes choses en Grand Prix. J’ai aussi de la chance qu’ils soient encore tous les deux très jeunes, 11 et 9 ans. Mon statut a changé, le regard des autres également.

Je vais toutefois continuer à monter les jeunes chevaux en concours car j’adore cela. Encore aujourd’hui je trouve que monter une finale des 6 ans n’est pas moins difficile que de dérouler un Grand Prix. Un jeune cheval, cela reste délicat. Il faut pouvoir bien piloter.

Larissa Pauluis et Flambeau (© Christophe Bortels)
Les Jeux olympiques, est-ce que tu en rêves ?

Laurence Roos est prioritaire et je ne lui veux que du bien. Elle mérite cette place. Mais je me tiens prête au cas où… C’est déjà dingue d’être là, comme réserviste. Je ne m’attendais pas à performer aussi vite et aussi fort. C’est génial ! D’autant que je peux encore faire mille fois mieux avec Flambeau. Il y a clairement une bonne étoile au-dessus de ma tête.

Flambeau et Valentin sont encore jeunes mais prépares-tu déjà la relève derrière eux ?

Oui. J’ai notamment Jordy (2014, Lord Leatherdale x Metall). Il est assez tardif et très chaud mais il est super talentueux. Il a obtenu des bons scores à 6 ans. Il réalise déjà quasiment tous les mouvements du Grand Prix mais il a encore le temps et je prends le temps. Il faudra encore deux ans pour l’avoir vraiment avec moi dans un rectangle. Derrière, il y a Kheops d’Hator (2015, Glock’s Toto Jr x Amsterdam) qui, en plus de super bien reproduire, tournera en Grand Prix dans le futur. Il piaffe et passage super bien pour un 6 ans. Il est d’une beauté incroyable. Il est assez étalon mais il est de plus en plus avec moi sous la selle.

Je peux aussi compter sur Macchiatto (2017, Winningmood x Cabochon), un propre frère d’Irish Coffee (2014) que j’ai vendu en Nouvelle-Zélande et qui y est maintenant champion national chez les seniors. Macchiatto est très prometteur, probablement l’un des meilleurs que j’ai eu sous ma selle.

© Christophe Bortels
A côté d’une possible participation aux Jeux olympiques de Tokyo cet été, quels sont tes objectifs pour ces prochains mois ?

Il y aura le championnat de Belgique des jeunes chevaux en août avec Kheops, peut-être aussi avec Jordy. Il y aura aussi le championnat d’Europe en septembre à Hagen avec Flambeau ou Valentin. J’aurais aimé participer au championnat du monde des jeunes chevaux mais je ne serai pas là pour les qualifications. Je serai au Mans car je veux me concentrer sur mes chevaux de Grand Prix. Le championnat de Belgique senior constituera également un objectif en octobre. C’est le seul titre qui me manque au niveau national. Après les poneys, les juniors et les jeunes cavaliers, ce serait chouette de pouvoir s’en emparer chez les seniors.

Pour conclure ce reportage, Larissa Pauluis nous fait le plaisir de présenter Flambeau et Valentin, ses deux atouts pour le haut niveau :

Christian Simonart

Co-fondateur de Cheval-in, Christian est depuis toujours passionné par le cheval et son univers. Cavalier amateur depuis sa plus tendre enfance, fan de découvertes chevalines en tout genre et grand partisan de l'utilisation (respectueuse) du cheval dans nos villes comme dans nos campagnes, il est journaliste équestre depuis près de vingt ans.