Shakira de Alborada, une jument « si spéciale »
Shakira de Alborada a couru sa dernière course à Carmona (Espagne) ce 17 avril. Agée de 16 ans, la jument à succès du Belge Peter Bastijns a souvent fait parler d’elle dans le milieu de l’endurance. Pour ses excellentes performances sportives mais aussi pour son caractère bien trempé qui lui a parfois joué de mauvais tours durant sa carrière sportive. Evocation avec son cavalier de toujours.
Shakira de Alborada est une jument Shagya née en Hongrie le 18 mai 2005. Achetée par Peter Bastijns, elle a réalisé la totalité de sa carrière sportive sous la selle du cavalier belge installé en Espagne, entre Valence et Alicante. Après des débuts internationaux manqués sur 80 km en juin 2011 à Besora (Espagne), Shakira a réussi sa première course de 160 km à Sant Feliu Saserra en mai 2013. Castelsagrat (2014), Mont-le-Soie (2015) et Rio Frio (2016) sont ensuite venus compléter son palmarès au même titre que les Jeux équestres mondiaux de Normandie (2014) que la jument grise a achevés en vingtième position.
Peter Bastijns, quelle est l’histoire de Shakira ?
Nous voulions lancer un petit élevage Shagya – Pur-Sang Arabe avec des amis et nous nous sommes rendus en Hongrie où nous avons acheté Shakira. Elle avait 1 an et nous l’avons laissée là-bas jusqu’à ses 3 ans. Elle est arrivée pleine en Espagne et a donné naissance à Omara de Alborada (Ndlr : née en 2009 et qui court avec Peter Bastijns sur 120 km). Lorsque nous avons commencé le travail avec elle à 5 ans, elle n’était pas facile à monter. Elle était même si spéciale qu’il était difficile d’avoir un avis sur sa future carrière. Soit elle ne ferait jamais rien de bon, soit elle gagnerait des compétitions.
A quel point était-elle si spéciale ?
Quand elle était dans un bon jour, Shakira faisait tout pour toi. Mais quand elle n’était pas dans un bon jour, alors tu avais un problème. A cause de son caractère, il y avait toujours quelque chose qui arrivait… et toujours quand elle était au meilleur de sa forme. Ne pas vouloir rentrer dans un van ou en sortir, prolonger une convalescence parce qu’elle faisait des bêtises au paddock, se casser cinq vertèbres dans le boxe,… Nous avons toujours tout fait pour la rendre heureuse mais c’est une Shagya et leur caractère n’est pas toujours évident.
Pensez-vous avoir tiré le maximum de son potentiel ?
Son coeur était phénoménal et à deux ou trois reprises durant sa carrière je me suis dit qu’elle était prête à réaliser quelque chose de grand, prête pour suivre le premier groupe en course. Mais à nouveau, elle était si spéciale… Je me souviens par exemple de cette préparation complètement folle pour le championnat de Belgique de Mont-le-Soie en 2015. Nous étions arrivés en Belgique le lundi et je ne la sentais pas « normale », elle ne mangeait pas. Le lendemain, nous sommes partis nous entraîner et elle a eu peur des vaches. Elle a piqué un sprint puis s’est arrêtée brusquement et marchait ensuite comme une ballerine, sur la pointe du pied ! J’ai dû la confier à un habitant du coin le temps de rentrer à pied pour aller chercher de l’aide. En la voyant, le vétérinaire a dit qu’elle ne pourrait pas prendre le départ du championnat de Belgique mais chaque jour son état s’améliorait et elle a finalement été phénoménale le jour de la course (Ndlr: remportée en solitaire, loin devant la concurrence).
Quel est votre meilleur souvenir avec Shakira ?
Il y a eu Mont-le-Soie, ou encore Rio Frio où elle a terminé cinquième après avoir couru toute seule du début à la fin. Mais mon meilleur souvenir reste les Jeux mondiaux de Normandie. Il s’agissait de notre premier championnat, l’ambiance était incroyable et la course très difficile tellement il avait plu les jours précédents. Nous étions aussi le seul couple belge à l’arrivée.
Pourquoi avoir voulu courir une dernière course avec Shakira mi-avril, alors que sa sortie précédente remontait à juin 2018 ?
C’était pour essayer encore une fois. Avec d’autres chevaux, j’ai parfois eu le sentiment d’avoir arrêté trop vite. Mais ici, après 30 km, je voyais bien que cela n’allait pas et j’ai préféré la retirer de la course. Je suis déjà content d’avoir pris le départ avec elle une dernière fois après son accident (Ndlr: les cinq vertèbres cassées dans le boxe) survenu fin 2018.
Quel sera désormais son avenir ?
Elle fera de l’élevage, chez nous, à la maison. Tout le monde sait que c’est une bonne jument et plusieurs personnes m’ont déjà contacté afin de me proposer leur étalon. Nous choisirons un Pur-Sang Arabe. Si tout se passe bien, elle donnera naissance à son deuxième poulain en 2022.
Pour conclure cet article, nous vous proposons un retour en image sur la victoire de Shakira de Alborada à l’issue du championnat de Belgique d’endurance 2015 à Mont-le-Soie.