Une sage-femme au service des chevaux

Dans le milieu des chevaux, certains deviennent cavaliers professionnels, d’autres grooms, vétérinaires, coachs, ostéopathes, marchands,… Clémence Baudoux, elle, s’est orientée vers le poulinage il y a une quinzaine d’années. Aujourd’hui, elle fait naître près de quatre-vingts poulains par an à Rebecq, au sein d’une écurie aux allures de maternité.

© Christian Simonart/Cheval-in
Clémence, vous gérez le poulinage de nombreuses juments chaque année. Comme décririez-vous votre métier ?

C’est un métier de passion ! On dit souvent que je suis sage-femme pour jument et j’apprécie cette description. Je n’ai peut-être pas la récompense d’un cavalier qui gagne une épreuve, mais j’ai néanmoins beaucoup de plaisir à voir naître un poulain mais aussi de le revoir plus tard sur un terrain de concours.

Comment fonctionne concrètement ce « service poulinage » ?

Tout débute avec l’arrivée chez moi de la jument. Je conseille toujours de l’amener un mois avant le poulinage, pour une question d’immunité et en sachant aussi qu’une jument peut pouliner trois semaines avant terme. La suite est une pension « normale ». Les juments sont sorties chaque jour au pré ou au paddock, seules, pour éviter les accidents. On apprend aussi à les connaitre avant le poulinage et c’est important. J’ai dix boxes avec caméra et dix ceintures de poulinage. Je suis toujours très méfiante – surtout avec les juments que je ne connais pas encore bien – car cela peut vraiment aller très vite. En cas de problème, j’ai un vétérinaire qui peut se déplacer très rapidement.

En quoi consistent les soins une fois le poulain sur ses jambes ?

Le lendemain de la naissance, le vétérinaire vient contrôler l’état général du poulain, les aplombs, les articulations, la bouche, les yeux,… Il recontrôle le cordon, vérifie si le poulain a bien évacué le méconium. Il refouille la jument pour voir si le col se referme bien, si elle est propre et si le placenta est bien complet. Je préconise aussi une prise de sang afin de vérifier que le taux d’immunité du poulain est assez élevé et qu’il a bien absorbé le colostrum. Seulement après, si tout va bien, le poulain peut aller en prairie avec sa mère. Certains rentrent chez eux après quatre ou cinq jours. Parfois les clients préfèrent que la jument soit réinséminée avant de rentrer.

Qui sont justement vos clients ?

Cela va de l’amateur, qui veut un poulain de sa jument, au professionnel de l’élevage en passant par le cavalier de concours. Ce sont en général des personnes qui n’ont pas le temps et/ou l’infrastructure pour s’occuper du poulinage.

2020 a été une année record pour vous avec plus de 80 naissances assurées à Rebecq. Comment s’annonce 2021 ?

J’ai déjà enregistré treize naissances (Ndlr : interview réalisée le 9 avril) et le record de l’année dernière devrait à nouveau être atteint. Avec le Covid et l’absence de concours, il y a eu plus de transferts d’embryons et je constate aussi que les gens sont vraiment motivés à l’idée d’élever.

On pourrait croire que le poulinage est une activité saisonnière concentrée sur le printemps, mais ce n’est pas vraiment le cas…

Non, l’activité débute en effet en février et s’arrête seulement en août, voire même en septembre. Et il y a parfois un rush pour inséminer en juillet et août. C’est gai, j’aime quand cela bouge. Il n’y a pas de routine non plus. J’ai encore les chevaux de mon élevage (Ndlr : du Champ du Bois), des retraités et des jeunes chevaux – maximum une quinzaine – que je garde ici jusqu’au débourrage et pour lesquels je gère les papiers, les vaccins et le passage du maréchal-ferrant.

Quels sont vos projets pour l’avenir ?

J’aime cette activité. Les clients sont contents et reviennent chaque année. Mon mari et moi venons d’acquérir 9 hectares de prairie supplémentaires avec la ferme qui les accompagne, à 3 kilomètres de nos écuries. A la maison (Ndlr : à 500 mètres des écuries), nous allons aussi construire un hangar pour y placer huit boxes pour les naissances et un petit laboratoire pour les inséminations.

© Christian Simonart/Cheval-in

« Plus de plaisir à m’occuper des chevaux »

La passion de Clémence Baudoux pour les chevaux ne doit rien à personne. Elle l’a alimentée toute seule, au fil de ses rencontres. « Petite, j’allais voir le fermier à côté de chez nous, à Bierghes, qui élevait des chevaux », se souvient la Brabançonne qui a rapidement mis le pied à l’étrier. « Mais j’ai toujours eu plus de plaisir à m’occuper des chevaux qu’à les monter », s’empresse-t-elle d’ajouter. La suite de son parcours en est d’ailleurs la parfaite démonstration… « C’est aux écuries du Vert Chasseur, auprès d’Axelle et Eric Clerfayt, que j’ai tout appris au niveau des soins à apporter aux chevaux. J’ai également passé deux-trois années très instructives chez Bénédicte Renson où je groomais et montais un ou deux chevaux par jour. »

Après avoir suivi une formation en assurance, Clémence s’est lancée à son compte en douceur. « J’ai eu la chance de trouver une petite écurie d’une dizaine de boxes à louer à Rebecq. J’ai commencé à prendre des chevaux en pension, généralement des retraités, mais une personne m’a confié une jument pleine et c’est comme cela que tout a commencé. Les demandes pour gérer les poulinages se sont multipliées, j’ai alors cherché des installations plus grandes et j’ai acheté la ferme, ici, à Rebecq, au lieu dit « Champ du Bois », en 2009. »

Egalement éleveuse, Clémence confie généralement ses jeunes chevaux à Jelle Limbourg. Hunger Games (Elvis ter Putte x Mytens), son premier produit, né en 2013, est désormais monté par le Suisse Romain Duguet.

Pour clôturer ce reportage, Clémence Baudoux partage de précieux conseils pour un poulinage sans problème :

Christian Simonart

Co-fondateur de Cheval-in, Christian est depuis toujours passionné par le cheval et son univers. Cavalier amateur depuis sa plus tendre enfance, fan de découvertes chevalines en tout genre et grand partisan de l'utilisation (respectueuse) du cheval dans nos villes comme dans nos campagnes, il est journaliste équestre depuis près de vingt ans.